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28 octobre 2018

Bouche artificielle : vers une meilleure compréhension des mécanismes en bouche

Imaginez, c’est l’heure de déjeuner. Au menu, des œufs durs mayonnaise avec quelques petits légumes assaisonnés, une blanquette de veau accompagnée de riz,  un morceau de fromage Comté et, comme dessert, une tarte aux pommes. Pour beaucoup d’entre nous, c’est un instant de plaisir, qui plus est convivial si nous sommes amenés à partager ce repas avec une ou plusieurs personnes. En revanche, pour notre bouche, cet organe qui nous permet de parler et de communiquer avec les autres mais aussi d’ingérer les aliments nécessaires à notre vie tout en libérant leurs saveurs et leurs arômes qui nous enchantent ou parfois nous déplaisent, commence alors l’une des séquences les plus intenses de sa tâche quotidienne. Si nous percevons notamment qu’elle mâche, qu’elle croque, qu’elle salive, qu’elle libère des saveurs et des arômes, que s’y passe-t-il plus précisément dans cette bouche, entre le moment où l’aliment y est introduit et celui où il est avalé et disparaît en direction de l’estomac via le tube digestif ?

 

Dans l’équipe « Flaveur Food Oral Processing et Perception » (FFOPP), que co-dirigent Christian Salles, directeur de recherche INRA, et Elisabeth Guichard, directrice de recherche INRA, au sein du Centre des Sciences du Goût et de l’Alimentation (CSGA) de l’INRA basé à Dijon, cette question est évidemment au cœur des travaux qui y sont menés, ceux-ci portant en effet sur la compréhension des mécanismes en bouche qui contribuent à la libération de la flaveur, autrement dit de l’ensemble des perceptions par l’être humain quand celui-ci consomme un produit alimentaire. « Nous nous intéressons plus particulièrement aux processus oraux comme la mastication et la salivation, c’est-à-dire à la manière dont un aliment est déstructuré en bouche et les stimuli sont libérés pour atteindre les récepteurs », explique Christian Salles. Pour appréhender ces mécanismes et étudier par exemple les interactions entre la mastication et la libération des arômes en bouche qui vont atteindre les récepteurs par voie rétro-nasale, les chercheurs peuvent avoir recours à l’approche in vivo qui nécessite alors de disposer d’un jury de dégustateurs plus ou moins important. « Le problème est qu’il existe plusieurs limitations comme par exemple une très grande dispersion dans les données collectées à cette occasion. Aussi avons-nous décidé au début des années 2000 d’expérimenter également une autre approche, in vitro celle-ci, en faisant appel à ce que nous appelons une bouche artificielle ou une machine à mâcher », précise-t-il.

 

L’appareil n’existant pas, il a donc fallu l’ébaucher puis le développer dès 2003, en collaboration avec la Plateform 3D de l’IUT du Creusot. Dotée d’une mâchoire supérieure, et une mâchoire inférieure complémentaire, une sorte de structure circulaire sur laquelle sont implantées des dents faites à partir de molaires scannées en 3D, mais aussi d’une langue et alimentée en salive artificielle dont le rôle est à la fois d’imprégner le bol alimentaire et de favoriser la libération des composés de la flaveur, on peut y programmer différentes forces de mastication, de compression, différents angles de cisaillement, des flux salivaires plus ou moins importants et y faire varier le nombre de dents. Utilisée pour la première fois en 2006, cette bouche artificielle n’a cessé depuis d’être perfectionnée et continue encore aujourd’hui d’être opérationnelle. Connectée par exemple à un spectromètre de masse, elle permet ainsi de suivre en temps réel la libération d’un certain nombre de composées d’arômes lors de la déstructuration d’un aliment en bouche. « Nous avons pu réaliser ainsi de nombreuses études en contrôlant des paramètres oraux, ce qui est impossible sur l’humain dans la mesure où ils ne sont pas toujours indépendants mais souvent couplés », rappelle ce chercheur dijonnais. Les données collectées sur l’humain servant en particulier à calibrer cette bouche artificielle qui intéresse évidemment les industriels, ceux-ci la voyant comme une aide précieuse dans la formulation de leurs produits alimentaires.

 

Mais aussi performante reste-t-elle, les chercheurs, toujours en quête de franchir de nouvelles étapes, réfléchissent et travaillent au développement d’une bouche artificielle de seconde génération, aux fonctionnalités optimisées et encore mieux instrumentée, « mais avant tout plus facile à utiliser afin de pouvoir faire de la mesure en continu », souligne Christian Salles. La partie mécanique a déjà été réalisée, une nouvelle fois en collaboration avec la Plateform 3D de l’IUT du Creusot. « Nous travaillons désormais en interne sur la partie commande et programmation et aux ajustement auxquels nous allons devoir procéder au niveau mécanique », note-t-il. Objectif, disposer d’un outil opérationnel à l’orée de l’année 2020. Un outil très attendu, d’autant plus que tout comme son prédécesseur, il sera relativement unique au monde, du moins à ce niveau de développement. D’où pour les chercheurs la possibilité de mieux comprendre l’impact de certains paramètres physiologiques sur la libération de la flaveur, selon que l’on mastique plus ou moins lentement, que l’on dispose d’un nombre de dents plus ou moins grand et que notre flux salivaire soit élevé ou réduit. Rendez-vous donc, si tout va bien, dans deux ans pour les premières mastications de cette bouche artificielle de seconde génération.

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